Les traitements cardiologiques
Les traitements de l'amylose
Prise en charge cardiologique des amyloses cardiaques
Le traitement cardiologique des cardiopathies amyloïdes se base essentiellement sur le traitement diurétique et la restriction sodée qui doivent être adaptés au niveau de congestion. Les bétabloquants et les bradycardisants ne sont pas recommandés. Une fréquence cardiaque élevée est le seul moyen de maintenir le débit cardiaque (Qcard = Fréquence cardiaque x stroke volume) du fait de la rigidité de la paroi, conséquence de l’infiltration myocardique, qui empêche toute augmentation du volume d’éjection (stroke volume = VTD -VTS). Les médicaments dromotropes négatifs sont contre indiqués puisque qu’ils peuvent aggraver les troubles de la conduction.
Enfin, dans le contexte de l’amylose il faut se méfier de tous les traitements hypotenseurs qui peuvent aggraver une dysautonomie et entraîner des chutes.
Les troubles du rythme atriaux sont fréquents et le recours à des antiarythmiques est souvent nécessaire. L’amiodarone est le médicament de choix pour maintenir un rythme sinusal en de fibrillation atriale paroxystique. Il est classiquement déconseillé d’utiliser la digoxine pour ralentir les troubles du rythme atriaux du fait de potentiels effets toxiques. Le dépistage des troubles de la conduction est nécessaire, tout d’abord sur l’ECG puis sur des holters. Des explorations endocavitaires à la recherche d’un allongement du temps de conduction infra-hissien (mesure du HV) peuvent être également réalisées.
Du fait du risque important de survenue de trouble de la conduction, les indications d’implantation de pacemaker doivent être larges dès que des anomalies apparaissent. Le risque embolique est important notamment lorsque les oreillettes sont très infiltrées (visualisable à l’IRM) car elles perdent leur activité contractile bien que leur activité « électrique » soit toujours normale, c.à.d. en rythme sinusal. (lien article)
Physiopathologie des amyloses cardiaques
PHYSIOPATHOLOGIE DE L’INFILTRATION : Les protéines amyloïdes infiltrent de manière diffuse les structures cardiaques. L’infiltration des parois ventriculaires est responsable d’une cardiomyopathie hypertrophique et restrictive causant une insuffisance cardiaque à FEVG le plus souvent préservée mais avec une physiopathologie très particulière. Des troubles rythmiques ventriculaires peuvent être observés, notamment dans les amyloses AL. L’infiltration de la paroi des oreillettes est à l’origine de troubles du rythme auriculaire et d’un défaut de la contractilité auriculaire, source de complications thrombo-emboliques. L’infiltration des faisceaux électriques est à l’origine de troubles conductifs. L’infiltration par les protéines amyloïdes est un phénomène dynamique, causant des complications évolutives. Un diagnostic précoce et une prise en charge précoce permettent de prévenir ces complications et d’améliorer la morbi-mortalité des patients.
DÉPENDANCE À LA FC : L’amylose cardiaque est une cardiomyopathie hypertrophique et restrictive, elle est caractérisée par une altération majeure de la compliance ventriculaire entraînant une absence de réserve de la pré-charge du ventricule et une diminution du volume d’éjection systolique. Le débit cardiaque étant le produit de la fréquence cardiaque par le volume d’éjection systolique, le débit cardiaque des cœurs amyloïdes est dépendant de la fréquence cardiaque. Une réduction de la fréquence cardiaque, secondaire à des troubles conductifs, une insuffisance chronotrope ou un traitement bradycardisant, entraîne une diminution du débit cardiaque, qui sera délétère et mal tolérée.
Traitement médical de l’insuffisance cardiaque
TRAITEMENTS SPÉCIFIQUES INDIQUÉS : Les amyloses AL et ATTR ont des traitements spécifiques qui sont les seuls à pouvoir stopper ou ralentir la maladie. Retrouvez ces informations et triptyques sur www.reseau-amylose.org.
TRAITEMENTS INDIQUÉS OU CONSEILLÉS :
Les diurétiques ont une place essentielle dans le traitement symptomatique pour contrôler les signes congestifs. De fortes doses de diurétiques de l’anse sont souvent nécessaires. Un autre diurétique (thiazidique ou spironolactone) peut être associé. Une restriction hydro-sodée doit être recommandée en cas d’hyponatrémie.
L’évaluation de la volémie pour ajuster la dose de diurétiques est une étape importante de la consultation médicale. Cette étape peut être difficile en cas d’amylose cardiaque et il faut s’appuyer sur des faisceaux d’arguments cliniques, biologiques et échographiques. Une surveillance par télé-cardiologie peut avoir un intérêt dans le suivi.
FC cible : 70-120 bpm
TRAITEMENTS NON INDIQUÉS OU DÉCONSEILLÉS :
Bétabloquants : Contrindiqués (excepté de rares situations, après avis expert : obstruction intra-ventriculaire gauche symptomatique et FA très rapide mal tolérée)
Inhibiteurs calciques bradycardisants : Contrindiqués (idem BB-)
Ivabradine : Contrindiquée (idem BB-)
Digoxine : Historiquement contrindiquée (liaison avec les fibrilles amyloïdes). Utilisation précautionneuse (risque rythmique).
IEC-ARA2 : Pas de preuve d’efficacité sur la cardiopathie amyloïde et risque d’hypotension artérielle. Réévaluer l’indication initiale si autre pathologie associée.
Sacubitril-Valsartan : Plutôt contre-indiqué (le Sacubritil pourrait inhiber la dégradation des fibrilles amyloides) et pas de preuve d’efficacité (dans PARAGON-HF, les amyloses cardiaques non exclues pourraient participer à la négativité de l’étude).
Anticoagulant et FA/Flutter
Indication : L’amylose cardiaque est une pathologie à haut risque thrombogène. Une fibrillation auriculaire est fréquemment observée au cours du suivi des amyloses cardiaques (jusqu’à 70% des cas), quel que soit le type d’amylose et sa prévalence augmente avec l’évolutivité de la maladie. Elle est source de complications thrombo-emboliques, les thrombis pouvant être observés de manière diffuse dans les deux oreillettes, même sous anticoagulation efficace. Des thrombis intra-cardiaques peuvent être observés en rythme sinusal, en cas d’altération sévère de la contractilité auriculaire, notamment dans les amyloses AL.
Bénéfice-Risque : Une anticoagulation efficace est recommandée en cas de trouble du rythme auriculaire avéré, quel que soit le score CHA2DS2-VASC du patient. Les Anti-Vitamine K comme les AOD peuvent être utilisés avec une efficacité et une sécurité semblables. Une anticoagulation efficace peut être discutée au cas par cas chez les patients en rythme sinusal présentant un risque thrombogène jugé élevé (infiltration auriculaire marquée à l’IRM, perte d’une contractilité auriculaire efficace en ETT, antécédents emboliques suspects). Le risque hémorragique doit être évalué pour chaque patient, notamment en cas d’amylose AL sous chimiothérapie.
FA et Flutter : Si la présence d’une arythmie auriculaire n’est pas associée à une surmortalité des amyloses cardiaques, des hospitalisations pour décompensation cardiaque sont plus fréquentes, la perte de la contraction auriculaire étant délétère pour le débit cardiaque. Des fréquences cardiaques plus élevées sont généralement tolérées car mieux supportées. Le traitement repose sur une anticoagulation curative et la Cordarone est recommandée en 1e intention pour réduire ou même pour ralentir une FA rapide symptomatique. Une FA lente peut justifier de l’implantation d’un pacemaker. Une FA rapide mal tolérée peut justifier d’un avis d’expert (minime dose béta-bloquant, ablation du NAV).
Prise en charge rythmologique
Cardioversion électrique : Il peut être raisonnable de tenter la restauration du rythme sinusal en cas de FA de novo ou précocément dans l’évolutivité de la maladie. Une ETO avant cardioversion est recommandée pour s’assurer de l’absence de thrombis intra-cardiaques, malgré une anticoagulation efficace. Des complications rythmiques sont plus fréquemment observées après cardioversion, il faudra se méfier du risque de bradycardie/dysfonction sinusale pouvant être mal tolérés et justifier d’une implantation de pacemaker préventive.
Ablation Flutter/FA : Une restauration du rythme sinusal par stratégie ablative peut être discutée avec un centre expert. Les résultats sont moins bons que dans la FA classique avec un risque de récurrence plus élevé. Ils semblent meilleurs dans les formes précoces de la maladie (infiltration moindre des oreillettes).
PM: L’infiltration des faisceaux électriques par les dépôts amyloïdes entraînent des troubles conductifs évolutifs. Ceux-ci peuvent être mal tolérés avec un risque de choc cardiogénique en cas de BAV de haut degré (bradychardie et perte de la systole atriale). Un suivi régulier par ECG et Holter ECG est recommandé. Des explorations invasives peuvent être proposées au cas par cas. Il est raisonnable de prévenir ces troubles conductifs en implantant un pacemaker de manière plus précoce que ce qui est recommandé de façon générale.
CRT : Une thérapie de resynchronisation ventriculaire peut être proposée au cas par cas en cas de FEVG < 35% après avis expert.
DAI : Des troubles du rythme ventriculaire peuvent être observés quel que soit le type d’amylose (AL > ATTR héréditaire> ATTR sauvage). L’implantation d’un DAI peut être proposée en prévention secondaire ou en prévention primaire si la FEVG est < 35%. Ceci peut se discuter au cas par cas après avis expert en cas de critères de gravité (strain très altéré, amylose AL IIIA).
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